Thème 29 : la personne et la société



1. La  dignité de la personne humaine

Toutes les créatures ont comme fin la gloire de Dieu. Les créatures irrationnelles tendent à la fin ultime d’une manière nécessaire.

Mais l’homme, en vertu de son âme et de ses puissances spirituelles d’intelligence et de volonté est doté de liberté et doit se tourner librement vers Dieu (cf. Catéchisme, 1705).

Il a été créé pour connaître, aimer et servir Dieu, et il trouve le bonheur dans cette connaissance et cet amour, qui sera plénier dans la gloire. La vie éternelle est sa dignité.


Par conséquent, l’homme doit glorifier Dieu dans toutes les choses et dans tous les actes de sa vie : Deo omnis gloria ! (cf. Chemin, 780 et 783). En ceci consiste la rectitude d’intention

La dignité de la personne humaine, qui naît de sa liberté, est augmentée car Dieu a voulu destiner l’homme à  la vision béatifique : voir Dieu face-à-face, en participant à la vie intime de la Très Sainte Trinité. Pour atteindre cette fin Dieu accorde à l’homme son aide à travers la loi et avec des grâces actuelles et surtout la grâce « sanctifiante », qui élève la nature humaine. (cf. Catéchisme, 1949).

C’est vrai que l’homme, blessé dans sa nature par le péché originel, est sujet à l’erreur et tend au mal, mais il conserve le désir de faire le bien (cf. Catéchisme, 1707).

Dieu éclaire le chemin de chaque homme en révélant la loi morale qui s’était obscurcie dans son cœur ; et il nous donne la force pour parcourir le chemin de la sainteté, moyennant la grâce divine, qui non seulement élève mais guérit notre nature. Le Christ nous a obtenu tous ces dons.

N’oublions pas que la personne humaine est « la seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle‑même » CONCILE VATICAN II, const. Gaudium et spes, 24.


« La personne n’est pas seulement quelque chose, mais quelqu’un » (Catéchisme, 1707).

Pour cette raison on ne peut jamais « considérer des personnes comme de purs moyens en vue d’un but » (Catéchisme, 1887).

Nous allons étudier dans ce thème 29 que, pour la personne humaine, la vie sociale n’est pas une simple option : la personne croît et réalise sa vocation à la sainteté uniquement si elle vit en union avec les autres.


La sociabilité humaine


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L’homme est appelé à manifester l’image de Dieu.

Ceci revient à dire que la vocation de l’homme est d’être chaque fois plus conforme au Christ (cf. 2 Co 3, 4 ; Rm 8, 29), puisque « c’est dans le Christ, « image du Dieu invisible » (Col 1, 15), que l’homme a été créé à « l’image et à la ressemblance » du Créateur ; et « c’est dans le Christ, Rédempteur et Sauveur, que l’image divine, altérée dans l’homme par le premier péché, a été restaurée dans sa beauté originelle et ennoblie de la grâce de Dieu » (Catéchisme, 1701).




Mais Dieu est « unité dans la Trinité : Il est unité dans la communion » JEAN PAUL II, Lettre Mulieris dignitatem, 15 août 1988, n. 7.
Le Père, le Fils et l’Esprit Saint (un seul Dieu dans l’unité de la Divinité) existent en tant personnes grâce aux insondables relations divines .
C’est pourquoi être personne à l’image et à la ressemblance de Dieu cela comporte aussi d’exister en relation à un autre, aux autres...


« Dire que l’homme est créé à l’image et à la ressemblance de ce Dieu, c’est dire aussi que l’homme est appelé à exister « pour » autrui, à devenir un don » ; cela veut dire qu’il est appelé à exister non seulement « avec » les autres ou « à côté » des autres, mais « pour » les autres, ce qui implique servir, aimer. Ainsi croît dans la personne l’image de Dieu, qui « est Amour » (1 Jn 4, 16).

 De cette façon le chrétien s’identifie au Christ qui s’est livré totalement pour nous. « Donner sa vie pour les autres. C’est la seule façon que nous ayons de vivre la vie de Jésus‑Christ et de ne faire qu’un avec Lui » (S. Josémaria, Via Crucis, XIVème Station).

La personne humaine ne peut atteindre sa propre pléni­tude autrement.
L’homme « ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui‑même » (CONCILE VATICAN II, const. Gaudium et spes, 24).



Toutes les personnes possèdent une même nature et une même origine ; elles ont été rachetées par le Christ et appelées à participer à la même béatitude divine, « tous jouissent donc d’une égale dignité » (Catéchisme, 1934).

À côté de cette égalité il y a aussi des différences entre les uns et les autres.

« Ces différences appartiennent au plan de Dieu, qui veut que chacun reçoive d’autrui ce dont il a besoin, et que ceux qui disposent de « talents » particuliers en communiquent les bienfaits à ceux qui en ont besoin » (Catéchisme, 1937).


« La personne humaine a besoin de la vie sociale.
Celle-ci ne constitue pas pour elle quelque chose de surajouté », mais une exigence de sa nature. Par l’échange avec autrui, la réciprocité des services et le dialogue avec ses frères, l’homme développe ses virtualités ; il répond ainsi à sa vocation » (Catéchisme, 1879).

« La liberté humaine se dégrade lorsque, se laissant aller à une vie de trop grande facilité, il s’enferme en lui-même comme dans une tour d’ivoire. »
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3. La société

La vocation de l’homme à manifester l’image de Dieu ne se limite pas à la manifestation par un individu isolé mais l’image de Dieu se manifeste aussi dans la vie sociale (cf. Catéchisme, 1877).

L’image divine dans l’homme « resplendit dans la communion des personnes, à la ressemblance de l’union des personnes divines entre elles » (Catéchisme, 1702).
En effet « Il existe une certaine ressemblance entre l’union des personnes divines et la fraternité que les hommes doivent instaurer entre eux » (Catéchisme, 1878).

« Une société est un ensemble de personnes liées de façon organique par un principe d’unité qui dépasse chacune d’elles » (Catéchisme, 1880).


« Certaines sociétés, telles que la famille et la cité, correspondent plus immédiatement à la nature de l’homme. Elles lui sont nécessaires » (Catéchisme, 1882).

La création de sociétés  répond à une tendance naturelle de la personne à la socialisation ; c’est un moyen pour développer ses qualités qu’il faut favoriser (cf. Catéchisme, 1882).

Chaque société se définit par sa fin et possède ses règles spécifiques, mais « la personne humaine est et doit être le principe, le sujet et la fin de toutes les institutions » Gaudium est spes 25.



Le principe de subsidiarité : « Une société d’ordre supérieur ne doit pas intervenir dans la vie interne d’une société d’ordre inférieur en lui enlevant ses compétences, mais elle doit plutôt la soutenir en cas de nécessité et l’aider à coordonner son action avec celle des autres éléments qui composent la société en vue du bien commun. »

JEAN PAUL II, enc. Centesimus annus, 48. Cf. Catéchisme, 1883.
« Le principe de subsidiarité s’oppose à toutes les formes de collectivisme. Il trace les limites de l’intervention de l’État. Il vise à harmoniser les rapports entre les individus et les sociétés.» (Catéchisme, 1885).

Dieu « remet à chaque créature les fonctions qu’elle est capable d’exercer, selon les capacités de sa nature propre. Ce mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le comportement de Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands égards pour la liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence divine » (Catéchisme, 1884).



Les péchés des hommes font naître dans la société des structures injustes ou structures de péché.
Cf. JEAN PAUL II, enc. Sollicitudo rei socialis, 36.
Elles reçoivent ce nom parce qu’elles rendent plus difficile la pratique de la vertu et plus faciles les péchés personnels (contre la justice, la charité, la chasteté, etc.).
Il peut s’agir de coutumes immorales généralisées (la corruption de fonctionnaires publics) ou de lois injustes (comme les lois sur l’avortement), etc.

« Or, quand elle parle de situations de péché ou quand elle dénonce comme péchés sociaux certaines situations ou certains comportements collectifs (…) l’Église sait et proclame que ces cas de péché social sont le fruit, l’accumulation et la concentration de nombreux péchés personnels de la part de ceux qui suscitent ou favorisent l’iniquité, voire l’exploitent ; de la part de ceux qui, bien que disposant du pouvoir pour faire quelques chose pour évi­ter, éliminer ou au moins limiter certains maux sociaux, omettent de le faire par incurie, par peur et complaisance devant la loi du silence, par complicité masquée ou par indifférence ; de la part de ceux qui cherchent refuge dans la prétendue impossibilité de changer le monde ; et aussi de la part de ceux qui veulent s’épargner l’effort ou le sacri­fice en prenant prétexte de motifs d’ordre supérieur » (JEAN PAUL II, exhort. ap. Reconciliatio et pænitentia, 16).

Ces structures de péché doivent être éliminées et remplacées par des structures justes. C’est une tâche qui revient spécialement aux fidèles laïcs, qui sont appelés à sanctifier le monde de l’intérieur.
Cf. CONCILE VATICAN II, const. Lumen gentium, 31 ; JEAN PAUL II, exhort. ap. Christifideles laici 15‑16.

En général il s’agit d’un processus, non pas d’un changement instantané. Les fidèles laïcs devront donc souvent vivre avec ces structures et en subir les conséquences sans se laisser corrompre et sans se décourager.
Il convient de méditer les paroles du Seigneur : « Je ne te prie pas de les retirer du monde, mais de les garder du Mauvais » (Jn 17, 15).



— Pour qu’il y ait des structures justes il doit y avoir des hommes justes. La sainteté des fidèles « contribue à promouvoir plus d’humanité dans les conditions d’existence » CONCILE VATICAN II, constLumen gentium, 40..

« Dieu veut une poignée d’hommes « à lui » dans chaque activité humaine. — Après quoi… pax Christi in regno Christi — la paix du Christ dans le règne du Christ. » (Chemin, 301)

— L’effort pour vivre avec cohérence les normes de la morale professionnelle, en plus d’être une condition nécessaire pour sanctifier le travail professionnel, est un moyen d’impor­tance capitale pour christianiser les relations professionnelles et la société tout entière de l’inté­rieur.

4. L’autorité

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« Toute communauté humaine a besoin d’une autorité qui la régisse. Celle‑ci trouve son fondement dans la nature humaine. Elle est nécessaire à l’unité de la Cité. Son rôle consiste à as­surer autant que possible le bien commun de la société » (Catéchisme, 1898).


« L’autorité exigée par l’ordre moral émane de Dieu » (Catéchisme, 1899 ; cf. Rm 13, 1).

Mais « la détermination des régimes politiques, comme la détermination de leurs dirigeants, doi­vent être laissées à la libre volonté des citoyens ».
CONCILE VATICAN II, const. Gaudium et spes, 74 ; cf. Catéchisme, 1901.

En ce qui concerne les systèmes politiques, « l’Église apprécie le système démocratique, comme le système qui assure la participation des citoyens aux choix politiques », et leur permet de « choisir et de contrôler leurs gouvernants ».
JEAN PAUL II, enc. Centesimus annus, 46.

L’organisation démocratique de l’État est une partie du bien commun.
Mais « la valeur de la démocratie se maintient ou disparaît en fonction des valeurs qu’elle incarne et promeut : sont certainement fondamentaux et indispensables la dignité de toute personne humaine, le respect de ses droits intangibles et inaliénables ».
JEAN PAUL II, enc. Evangelium vitæ 25 mars 1995, 70. Le pape se réfère en particulier au droit de chaque être humain innocent à la vie, qui est bafoué par les lois autorisant l’avortement.


« Une démocratie sans valeurs se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois. »

« L’autorité ne tire pas d’elle‑même sa légitimité morale. Elle ne doit pas se comporter de manière despotique, mais agir pour le bien commun » (Catéchisme, 1902).


Elle doit pratiquer la justice distributive, en évitant le favoritisme et tout intérêt personnel contraire au bien commun (cf. Catéchisme, 2236).

— « L’autorité ne s’exerce légitimement que si elle recherche le bien commun du groupe considéré et si, pour l’atteindre, elle emploie des moyens moralement licites. S’il arrive aux dirigeants d’édicter des lois injustes ou de prendre des mesures contraires à l’ordre moral, ces dis­positions ne sauraient obliger les consciences » (Catéchisme, 1903).
« Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5, 29).


« Si les pouvoirs publics peuvent parfois renoncer à réprimer ce qui provoquerait, par son interdiction, un dommage plus grave (cf. saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiæ I‑II, q. 96, a. 2, c. , c’est en ceci que consiste la tolé­rance), ils ne peuvent cependant jamais accepter de légitimer, au titre de droit des individus (même si ceux‑ci étaient la majorité des membres de la société) l’atteinte portée à d’autres personnes par la méconnaissance d’un droit aussi fondamental que ce­lui à la vie » JEAN PAUL II, enc. Evangelium vitæ 71.

Le Bien Commun



Définition de « bien commun »

On entend par bien commun « l’ensemble des conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres d’atteindre leur perfection, d’une façon plus totale et plus aisée ».Gaudium et spes 26 ; CEC 1906

 

Règle d’or pour comprendre la notion de « bien commun » : Mon bien dépend du bien des autres et le bien des autres dépend du bien de chaque personne.

« Conformément à la nature sociale de l’homme, le bien de chacun est nécessairement en rapport avec le bien commun » (Catéchisme, 1905).

« Le bien commun est toujours orienté vers le progrès des personnes » (Catéchisme, 1912).

Concrètement « l’ordre social et son progrès doivent toujours tourner au bien des personnes, puisque l’ordre des choses doit être subordonné à l’ordre des personnes et non l’inverse » (CONCILE VATICAN II, const. Gaudium et spes, 26).

 

Les trois éléments du bien commun :

Le bien commun comporte « trois éléments essentiels » (Catéchisme, 1906) :

1. — respecter la personne et sa liberté : et il faut tenir compte que le bien de la personne (et, par conséquent, le bien commun) n’est pas seulement d’ordre matériel mais aussi spirituel ;
« Au nom du bien commun, les pouvoirs publics sont tenus de respecter les droits fondamentaux et inaliénables de la personne humaine. En particulier, le bien commun réside dans les conditions d’exercice des libertés naturelles qui sont indispensables à l’épanouissement de la vocation humaine » (Catéchisme, 1907)
Le premier droit à respecter est le droit à la vie, depuis la conception jusqu’à la mort.

2. — chercher le bien-être social et le développement humain intégral ;
L’autorité, respectant le principe de subsidiarité et promouvant l’initiative privée, doit faire en sorte que chacun dispose de ce dont il a besoin pout mener une vie véritablement humaine : alimentation, vêtement, santé, travail, éducation et culture, information adéquate, etc. (cf. Catéchisme, 1908 et 2211).

3.— promouvoir la paix, c’est‑à‑dire « la durée et la sécurité d’un ordre juste » (Catéchisme, 1909).
La paix n’est pas seulement l’absence de guerre. La paix ne peut être obtenue sans la sauvegarde des biens des personnes et le respect de leur dignité (cf. Catéchisme, 2304).
La paix est la « tranquillité de l’ordre » (SAINT AUGUSTIN, De civitate De i, 19, 13).
C’est une œuvre de la justice (cf. Is 32, 17).
L’autorité doit chercher à assurer par des moyens licites la sécurité de la société et de ses membres.
Le bien commun « fonde le droit à la légitime défense personnelle et collective » (Catéchisme, 1909).

 

« Le bien commun ne s’étend pas seulement à la ville ou au pays. Il existe un bien commun universel. Pour le promouvoir il faut « une organisation de la communauté des nations » (Catéchisme, 1911).

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