Saint Jean de la Croix
Jean de
la Croix (1542-1591), religieux carme espagnol, rencontra à vingt-cinq ans
Thérèse d’Avila, la réformatrice du Carmel.
Il voulut
adopter, lui aussi, l’observance primitive, mais ses supérieurs s’y opposèrent
violemment.
La
persécution ne fit qu’aider à son union avec Dieu sur les sommets de la vie
mystique, dont ses écrits ont gardé la brûlure.
Benoît
XVI
AUDIENCE
GÉNÉRALE, 16 février 2011
Saint Jean de la
Croix
Chers frères et
sœurs,
Il y a deux
semaines, j'ai présenté la figure de la grande mystique espagnole Thérèse de
Jésus. Je voudrais aujourd'hui parler d'un autre saint important de ces
territoires, ami spirituel de sainte Thérèse, réformateur, avec elle, de la
famille religieuse carmélitaine : saint Jean de la Croix, proclamé Docteur
de l'Église par le Pape Pie XI, en 1926, et surnommé dans la tradition Doctor
mysticus, « Docteur mystique ».
Jean de la Croix
naquit en 1542 dans le petit village de Fontiveros, proche d'Avila, en Vieille
Castille, de Gonzalo de Yepes et Catalina Alvarez. Sa famille était très
pauvre, car son père, issu d’une famille noble de Tolède, avait été chassé de
chez lui et déshérité pour avoir épousé Catalina, une humble tisseuse de soie.
Orphelin de père dans son jeune âge, Jean, à neuf ans, partit avec sa mère et
son frère Francisco pour Medina del Campo, non loin de Valladolid, un pôle
commercial et culturel. Il y fréquenta le Colegio de los Doctrinos, en assurant
également d'humbles travaux pour les sœurs de l'église-couvent de la Madeleine.
Par la suite, vues ses qualités humaines et ses résultats dans les études, il
fut admis d'abord comme infirmier dans l'Hôpital de la Conception, puis au
Collège des jésuites, qui venait d'être fondé à Medina del Campo : Jean y
entra à dix-huit ans et étudia pendant trois ans les sciences humaines, la
rhétorique et les langues classiques. À la fin de sa formation, sa vocation lui
était très claire : la vie religieuse et, parmi tous les ordres présents à
Medina, il se sentit appelé au carmel.
Au cours de l'été
1563, il débuta le noviciat chez les carmes de la ville, en prenant le nom
religieux de Mattia. L'année suivante, il fut destiné à la prestigieuse
université de Salamanque, où il étudia pendant un triennat les arts et la
philosophie. En 1567, il fut ordonné prêtre et retourna à Medina del Campo pour
célébrer sa première Messe entouré de l'affection de sa famille. C'est là
qu'eut lieu la première rencontre entre Jean et Thérèse de Jésus. La rencontre
fut décisive pour tous les deux : Thérèse lui exposa son programme de
réforme du carmel, l’appliquant également à la branche masculine de l'ordre et
proposa à Jean d'y adhérer « pour la plus grande gloire de
Dieu » ; le jeune prêtre fut fasciné par les idées de Thérèse, au
point de devenir un grand défenseur du projet. Ils travaillèrent ensemble
quelques mois, partageant les idéaux et les propositions pour inaugurer le plus
rapidement possible la première maison des carmes déchaux : l'ouverture
eut lieu le 28 décembre 1568 à Duruelo, un lieu isolé de la province d'Avila.
Avec Jean, trois autres compagnons formaient cette première communauté
masculine réformée. En renouvelant leur profession de foi selon la Règle
primitive, tous les quatre adoptèrent un nouveau nom : Jean s'appela dès
lors « de la Croix », nom sous lequel il sera universellement connu.
À la fin de 1572, à la demande de sainte Thérèse, il devint confesseur et
vicaire du monastère de l’Incarnation d'Avila, où la sainte était prieure. Ce
furent des années d'étroite collaboration et d'amitié spirituelle, qui les
enrichit tous deux. C'est à cette période que remontent aussi les plus
importantes œuvres de Thérèse et les premiers écrits de Jean.
L’adhésion à la
réforme du carmel ne fut pas facile et coûta également de graves souffrances à
Jean. L’épisode le plus traumatisant fut, en 1577, son enlèvement et son
incarcération dans le couvent des carmes de l’antique observance de Tolède, à
la suite d’une accusation injuste. Le saint fut emprisonné pendant des mois,
soumis à des privations et des contraintes physiques et morales. En ce lieu, il
composa, avec d’autres poésies, le célèbre Cantique spirituel. Finalement, dans
la nuit du 16 au 17 août 1578, il réussit à fuir de façon aventureuse, se
réfugiant dans le monastère des carmélites déchaussées de la ville. Sainte
Thérèse et ses compagnons réformés célébrèrent avec une immense joie sa
libération et, après une brève période pour retrouver ses forces, Jean fut
destiné à l’Andalousie, où il passa dix ans dans divers couvents, en
particulier à Grenade. Il assuma des charges toujours plus importantes dans
l’ordre, jusqu’à devenir vicaire provincial, et il compléta la rédaction de ses
traités spirituels. Il revint ensuite dans sa terre natale, comme membre du
gouvernement général de la famille religieuse thérésienne, qui jouissait
désormais d’une pleine autonomie juridique. Il habita au carmel de Ségovie,
exerçant la charge de supérieur de cette communauté. En 1591, il fut relevé de
toute responsabilité et destiné à la nouvelle province religieuse du Mexique.
Alors qu’il se préparait pour ce long voyage avec dix autres compagnons, il se
retira dans un couvent solitaire près de Jaén, où il tomba gravement malade.
Jean affronta avec une sérénité et une patience exemplaires d’immenses
souffrances. Il mourut dans la nuit du 13 au 14 décembre 1591, alors que ses
confrères récitaient l’office de mâtines. Il les quitta en disant :
« Aujourd’hui je vais chanter l’Office au ciel ». Sa dépouille
mortelle fut transférée à Ségovie. Il fut béatifié par Clément X en 1675 et
canonisé par Benoît XIII en 1726.
Jean est
considéré comme l’un des plus importants poètes lyriques de la littérature
espagnole. Ses plus grandes œuvres sont au nombre de quatre : « La
montée du Mont Carmel », « La nuit obscure », « Les
cantiques spirituels » et « La vive flamme d’amour ».
Dans les
Cantiques spirituels, saint Jean présente le chemin de purification de l’âme,
c’est-à-dire la possession progressive et joyeuse de Dieu, jusqu’à ce que l’âme
parvienne à sentir qu’elle aime Dieu avec le même amour dont Il l’aime. La vive
flamme d’amour poursuit dans cette perspective, en décrivant plus en détail
l’état de l’union transformante avec Dieu. Le parallèle utilisé par Jean est
toujours celui du feu : de même que le feu, plus il brûle et consume le
bois, plus il devient incandescent jusqu’à devenir flamme, ainsi l’Esprit
Saint, qui au cours de la nuit obscure purifie et « nettoie » l’âme,
avec le temps l’illumine et la réchauffe comme si elle était une flamme. La vie
de l’âme est une incessante fête de l’Esprit Saint, qui laisse entrevoir la
gloire de l’union avec Dieu dans l’éternité.
La montée du Mont
Carmel présente l’itinéraire spirituel du point de vue de la purification
progressive de l’âme, nécessaire pour gravir le sommet de la perfection
chrétienne, symbolisée par le sommet du Mont Carmel. Cette purification est
proposée comme un chemin que l’homme entreprend, en collaborant avec l’action
divine, pour libérer l’âme de tout attachement ou lien d’affection contraire à
la volonté de Dieu. La purification, qui pour parvenir à l’union d’amour avec
Dieu doit être totale, commence par celle de la vie des sens et se poursuit par
celle que l’on obtient au moyen des trois vertus théologales : foi,
espérance et charité, qui purifient l’intention, la mémoire et la volonté. La
nuit obscure décrit l’aspect « passif », c’est-à-dire l’intervention
de Dieu dans ce processus de « purification » de l’âme. L’effort
humain, en effet, est incapable tout seul d’arriver jusqu’aux racines profondes
des inclinations et des mauvaises habitudes de la personne : il peut
seulement les freiner, mais non les déraciner complètement. Pour cela, l’action
spéciale de Dieu est nécessaire, qui purifie radicalement l’esprit et le
dispose à l’union d’amour avec Lui. Saint Jean qualifie de
« passive » cette purification, précisément parce que, bien
qu’acceptée par l’âme, elle est réalisée par l’action mystérieuse de l’Esprit
Saint qui, comme la flamme du feu, consume toute impureté. Dans cet état, l’âme
est soumise à tous types d’épreuves, comme si elle se trouvait dans une nuit
obscure.
Ces indications
sur les œuvres principales du saint nous aident à nous familiariser avec les
points principaux de sa vaste et profonde doctrine mystique, dont l’objectif
est de décrire un chemin sûr pour parvenir à la sainteté, l’état de perfection
auquel Dieu nous appelle tous. Selon Jean de la Croix, tout ce qui existe, créé
par Dieu, est bon. À travers les créatures, nous pouvons parvenir à la
découverte de Celui qui a laissé en elles une trace de lui. La foi, quoi qu’il
en soit, est l’unique source donnée à l’homme pour connaître Dieu tel qu’il est
en soi, comme Dieu Un et Trine. Tout ce que Dieu voulait communiquer à l’homme,
il l’a dit en Jésus Christ, sa Parole faite chair. Jésus Christ est le chemin
unique et définitif vers le Père (cf. Jn 14, 6). Toute chose créée n’est rien
par rapport à Dieu et ne vaut rien en dehors de Lui : par conséquent, pour
atteindre l’amour parfait de Dieu, tout autre amour doit se conformer dans le
Christ à l’amour divin. C’est de là que découle l’insistance de saint Jean de
la Croix sur la nécessité de la purification et de la libération intérieure
pour se transformer en Dieu, qui est l’objectif unique de la perfection. Cette
« purification » ne consiste pas dans la simple absence physique des
choses ou de leur utilisation ; ce qui rend l’âme pure et libre, en
revanche, est d’éliminer toute dépendance désordonnée aux choses. Tout doit
être placé en Dieu comme centre et fin de la vie. Le processus long et fatigant
de purification exige certainement un effort personnel, mais le véritable
protagoniste est Dieu : tout ce que l’homme peut faire est
d’ « être disposé », être ouvert à l’action divine et ne pas lui
opposer d’obstacle. En vivant les vertus théologales, l’homme s’élève et donne une
valeur à son engagement. Le rythme de croissance de la foi, de l’espérance et
de la charité va de pair avec l’œuvre de purification et avec l’union
progressive avec Dieu jusqu’à se transformer en Lui. Lorsque l’on parvient à
cet objectif, l’âme est plongée dans la vie trinitaire elle-même, de sorte que
saint Jean affirme qu’elle parvient à aimer Dieu avec le même amour que celui
avec lequel il l’aime, car il l’aime dans l’Esprit Saint. Voilà pourquoi le
Docteur mystique soutient qu’il n’existe pas de véritable union d’amour avec
Dieu si elle ne culmine pas dans l’union trinitaire. Dans cet état suprême,
l’âme sainte connaît tout en Dieu et ne doit plus passer à travers les
créatures pour arriver à Lui. L’âme se sent désormais inondée par l’amour divin
et se réjouit entièrement en lui.
Chers frères et
sœurs, à la fin demeure la question : ce saint, avec sa mystique élevée,
avec ce chemin difficile vers le sommet de la perfection, a-t-il quelque chose
à nous dire à nous également, au chrétien normal qui vit dans les circonstances
de cette vie actuelle, ou est-il un exemple, un modèle uniquement pour quelques
âmes élues, qui peuvent réellement entreprendre ce chemin de la purification,
de l’ascèse mystique ? Pour trouver la réponse, nous devons avant tout
tenir compte du fait que la vie de saint Jean de la Croix n’a pas été un
« envol sur les nuages mystiques », mais a été une vie très dure,
très pratique et concrète, tant comme réformateur de l’ordre, où il rencontra
de nombreuses oppositions, que comme supérieur provincial, ou dans les prisons
de ses confrères, où il était exposé à des insultes incroyables et à de mauvais
traitements physiques. Cela a été une vie dure, mais précisément au cours des
mois passés en prison, il a écrit l’une de ses œuvres les plus belles. Et
ainsi, nous pouvons comprendre que le chemin avec le Christ, aller avec le
Christ, « le Chemin », n’est pas un poids ajouté au fardeau déjà
assez difficile de notre vie, ce n’est pas quelque chose qui rendrait encore
plus lourd ce fardeau, mais il s’agit d’une chose totalement différente, c’est
une lumière, une force, qui nous aide à porter ce fardeau. Si un homme porte en
lui un grand amour, cet amour lui donne presque des ailes, et il supporte plus
facilement toutes les épreuves de la vie, car il porte en lui cette grande lumière ;
telle est la foi : être aimé par Dieu et se laisser aimer par Dieu en
Jésus Christ. Se laisser aimer est la lumière qui nous aide à porter le fardeau
de chaque jour. Et la sainteté n’est pas notre œuvre, très difficile, mais elle
est précisément cette « ouverture » : ouvrir les fenêtres de
notre âme pour que la lumière de Dieu puisse entrer, ne pas oublier Dieu car
c’est précisément dans l’ouverture à sa lumière que se trouve la force, la joie
des rachetés. Prions le Seigneur afin qu’il nous aide à trouver cette sainteté,
à nous laisser aimer par Dieu, qui est notre vocation à tous et la véritable
rédemption. Merci.
*Jésus bonsoir* ! Élie va venir pour remettre toute chose
à sa place
14 décembre. Saint Jean de la Croix. Samedi de la 2ème semaine de l’Avent.
Élie est déjà
venu. Pas physiquement ! Ce qui est déjà venu, c'est son message.
Un message de
conversion qui est venu par l'intermédiaire de Jean le Baptiste.
Jésus, le Fils de
Dieu, le Verbe de Dieu, sa Parole, est aussi venu et nous l'avons crucifié et
continuons à le crucifier par nos péchés.
Mais Jésus
reviendra pour juger.
Et avec lui
viendront Moïse (les commandements) et Elie (pour nous purifier en nous
convertissant avec le feu de son Amour).
Viens Jésus,
viens. Je t'attends. Purifie-moi comme tu as purifié le cœur de Jean de la
Croix.
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Matthieu 17, 10-13
Descendant de la montagne, les disciples interrogèrent Jésus :
« Pourquoi donc les scribes disent-ils que le prophète Élie doit venir
d’abord ? »
Jésus leur répondit : « Élie va venir pour remettre toute chose à
sa place.
Mais, je vous le déclare : Élie est déjà venu ; au lieu de le
reconnaître, ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu.
Et de même, le Fils de l’homme va souffrir par eux. »
Alors les disciples comprirent qu’il leur parlait de Jean le Baptiste.
Ben Sirac le Sage 48
Toi qui fus enlevé dans un tourbillon de feu par un char aux coursiers de
feu ;
… heureux ceux qui te verront, heureux ceux qui, dans l’amour, se seront
endormis ; nous aussi, nous posséderons la vraie vie.
Psaume 79
Dieu de l’univers, reviens !
Du haut des
cieux, regarde et vois :
visite cette
vigne, protège-la,
celle qu’a
plantée ta main puissante.